L’invasion des Bots, explications !

Le 12/04/2016
Par Chloé Decombes

A moins d’avoir vécu en totale autarcie ces derniers jours, vous avez sûrement entendu parler des Bots, cette technologie qui va envahir notre quotidien d’ici peu… C’est un peu inquiétant dit comme ça, mais nous allons tâcher de clarifier le sujet. 

Les Bots sont des programmes informatiques intelligents qui peuvent interagir avec leurs interlocuteurs en langage naturel pour répondre à leurs besoins et à leurs demandes. 

Malgré l’engouement un peu brusque que les Bots suscitent ces derniers temps, cela fait un certain temps qu’ils ont pointé le bout de leur nez… Par exemple, le Bot A.L.I.C.E a vu le jour dès 1995, grâce au Dr Richard S. Wallace, scientifique en avance sur son temps. A l’époque, c’était l’un des Bots les plus aboutis, il a d’ailleurs remporté trois prix consécutifs (Prix Loebner, une compétition entre Bots), mais les limites se sont rapidement fait sentir, faute d’une base de données trop restreinte et de compétences en Machine Learning encore trop faibles. C’est également avec nostalgie que l’on repense à “Clippy”, trombone sympathique aux yeux globuleux, sorti en 1997. Il pouvait vous assister dans vos tâches au sein du Pack Office.
Plus récemment, de nombreuses plateformes ont déjà développé leur Bot : Kik (cf. images ci-dessous), Wechat, Line… Depuis, les avancées en la matière n’ont cessé de gagner du terrain, c’est donc tout naturellement que la révolution des Bots a sonné. Ils sont nombreux à vouloir les mettre au premier plan ; Facebook grâce à l’intermédiaire de son application Messenger, et Microsoft par le biais de Skype. Nous avons eu les sites web, puis les applications, c’est aujourd’hui au tour des Bots de bousculer notre mode de consommation ! Un petit mot de Satya Nadella, PDG de Microsoft, qui reflète l’ampleur de cette révolution : “Cette transition vers les Bots est aussi importante que l’arrivée du web ou l’utilisation de l’écran tactile sur smartphone” : tremble App Store !

Qu’est-ce que les Bots vont changer dans notre quotidien ? 

Concrètement, grâce aux Bots, vous pourrez, depuis une seule et même application (par exemple Facebook Messenger, ou Skype), réserver un billet d’avion, commander un taxi, acheter des vêtements, commander à manger… Et bien plus encore ! Le fait est que, les Bots, dotés d’une IA (Intelligence Artificielle) ultra sophistiquée, pourront également échanger des informations avec votre assistant virtuel (Skype avec Cortana). Ils puiseront dans toutes les données qu’ils pourront mobiliser sur vous pour faire des suggestions ou propositions qui leur semblent pertinentes. Par exemple, au sein d’une conversation, s’il est question de vacances dans le sud, le Bot d’une chaîne d’hôtels pourra vous proposer ses services, tout comme celui d’une agence de voyage. Le but est de simplifier (et d’encourager) la consommation grâce à la reconnaissance du langage naturel. Ces Bots fonctionnent grâce au Machine Learning, plus vous échangerez avec eux, plus ils pourront cerner vos envies et vos besoins.
Par rapport aux assistants virtuels, la grande différence c’est l’aspect financier. Si Siri, Cortana, ou encore Google Now vous aident à naviguer au sein de votre smartphone, et à organiser votre quotidien par commande vocale, les Bots pourront aller plus loin en prenant le relais des assistants virtuels. Imaginons que vous demandiez à votre assistant virtuel de programmer un rendez-vous au Sacré-Cœur pour 18h, le Bot Uber vous proposera instantanément de vous envoyer un taxi pour le trajet.
De leur côté, les applications vont devenir moins attractives, car elles n’apportent pas d’interactions brand/user… De nos jours, c’est la relation qui importe aux consommateurs, ils veulent se sentir valorisés, et avoir une offre qui réponde à leur personnalité. Qui plus est, c’est un vrai gain de place : aujourd’hui on accumule des applications sur nos smartphones, certaines que l’on a ouvertes une seule fois…
Et si demain nous n’avions qu’à converser avec l’enseigne souhaitée en ouvrant Facebook Messenger ou Skype ? A terme, il n’est pas invraisemblable que toutes les enseignes possèdent leurs propres Bots. Même si l’arrivée de ces derniers met en lumière un nouveau mode de consommation, ils seront aussi là pour nous informer (news du matin, retard sur votre train etc..), et nous distraire.

Microsoft et Facebook, les deux grands acteurs. 

Lors de la Build 2016 (la conférence destinée aux développeurs), Microsoft a dévoilé ses intentions de placer les Bots au cœur de ses priorités, et le géant a de quoi s’imposer dans le milieu. Il a déjà toutes les cartes en main pour briller dans le domaine. Malgré la tentative ratée du robot Tay, supposé avoir la personnalité d’une adolescente de 15 ans sur Twitter, Satya Nadella a souligné lors de la conférence, que ce n’était que le début, et que les choses allaient s’accélérer. Grâce à son IA, à Cortana (son assistante personnelle), à Bing (son moteur de recherche), au Cloud et à sa plateforme de développeur, Microsoft va incessamment sous peu faire fleurir de nombreux Bots, qui seront capables de comprendre les humains et d’interagir avec eux selon les besoins et envies détectés, anticipés, ou exprimés. Le moyen de ces ambitions ? Ce n’est autre que la plateforme “Skype” (Skype Bot Plateform), grâce à laquelle Microsoft veut réaliser de nombreuses performances. Notamment offrir aux enfants (et aux adultes) la possibilité de se construire un monde, et d’interagir avec leur personnage de dessin animé préféré, comme ils le feraient avec une vraie personne, lors d’une conversation vidéo. Les possibilités sont infinies en partant de cela… Un Bot pour faire les devoirs, un qui enseigne la cuisine, un pour payer ses factures d’électricité (WeChat le permet déjà en Asie), un autre pour nous accompagner dans nos démarches administratives… La fonction vidéo de Skype nous insuffle beaucoup d’idées quant à l’avenir des Bots dans notre société.

Facebook qui a tenu, ce mardi, sa F8 2016 (tout comme la Build 2016, cette conférence est également réservée aux développeurs), a annoncé l’ouverture prochaine d’un Bots Store, et la possibilité pour les enseignes de développer au sein de Facebook Messenger leurs propres Bots, permettant la modification des rapports entre celles-ci et leurs clients. On comprend mieux pourquoi Facebook voulait réussir la migration sur Messenger. La force de ce géant : 900 millions d’utilisateurs. Avec un tel poids et par conséquent, une telle quantité de données, les enseignes vont très rapidement développer leurs Bots sur Messenger. Reste à savoir quand WhatsApp et son milliard d’utilisateurs passeront le cap à leur tour. Racheté par Facebook il y a deux ans, ce dernier attend peut-être de constater les résultats sur Facebook Messenger pour lancer les Bots sur WhatsApp.

Quelles sont les limites actuelles de ces Bots, quelles interrogations soulèvent-ils ?

Dans un premier temps, il y a le sujet de la sécurité des informations communiquées qui va soulever des questions. Pour profiter des services marchands des Bots, il nous faudra communiquer nos coordonnées bancaires… Et Facebook Messenger ou Skype sont d’importantes plateformes où vont converger de multiples fonctionnalités : comment être sûr que nos données ne seront pas dérobées, ou partagées avec d’autres Bots ou individus ? Telle est la question. Après la grande révélation des Bots, on attend donc aussi de savoir comment les géants vont gérer toutes les informations transmises. La question de la vie privée est aussi de rigueur. Si auparavant Facebook Messenger ou Skype étaient des espaces personnels, où l’on échangeait avec des individus que l’on connaissait, n’est-ce pas un peu intrusif d’avoir un Bot qui viendra toquer à notre messagerie pour nous proposer ses services, lorsqu’il détectera un mot clef dans l’une de nos conversations ? Et comment gérer la concurrence ? Va-t-il y avoir des dizaines de Bots de chaîne d’hôtels qui viendront nous vendre leurs chambres lorsqu’on parlera de partir en week-end ? Nous en sommes pour l’instant aux prémices de cette “révolution”, et il est certain qu’elle soulève quelques problématiques qui seront, nous l’espérons, éclairées sous peu.
Kik avait lancé il y a 3 ans de cela le Bot d’une star, “Harry Styles”, avec qui les adolescentes (en majorité) pouvaient parler. Le Bot avait été programmé de telle sorte qu’il agisse comme le ferait un “boyfriend”. Cela pose de toute évidence des problèmes éthiques. Lorsque l’on constate l’état dans lequel peuvent se mettre les fans lorsqu’elles voient leur idole, on ne peut qu’imaginer les effets d’une relation avec eux, même virtuelle. L’illusion de parler à un humain entraîne quelques débordements, voir déséquilibres (de nature psychologique, en majorité), qu’il serait bon de pouvoir gérer au mieux.

Réalité virtuelle, réalité augmentée, des Bots qui vont s’immiscer progressivement dans notre quotidien… N’est-on pas en train de se déconnecter lentement de LA réalité ?